Il
voyagea. Il connut la mélancolie des paquebots, les froids réveils sous la tente, l’étourdissemnt des paysages et des ruines, l’amertume des sympathies interrompues. Il revint. G. Flaubert
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Conclusions provisoires de Palerno : |
Que trouve-t-on sur l’Internet ? Essentiellement tout et n’importe quoi. Mais n’allez
pas croire : pas spécialement plus de n’importe quoi que de tout.
Grâce à la clairvoyance des journalistes, leur froideur
professionnelle et leur salutaire mouvement de recul devant l’aubaine
du papier scandaleux, Palerno savait avant même d’y avoir mis les
pieds que l’on trouvait sur Internet des nazis, des pédophiles, des
sectateurs et des sectaires, et des gens qui donnent les bonnes adresses
pour trouver des graines hybrides de première génération de
marijuana, et la méthode pour les cultiver en appartement. Mais le problème, dit Palerno, ce n’est pas l’existence de sites nazis ou pédophiles, le problème est qu’il existe des nazis, des pédophiles, et des gens assez absurdes pour faire pousser la marijuana dans des appartements. |
Faut-il les dissoudre ? |
On lui a parlé de microcosme, et
Palerno souscrit provisoirement à cette idée : tout et n’importe
quoi. Et cela ne gêne pas Palerno de le laisser croire. L’Expert lui
a montré : des jolies filles, parfois dénudées, et faisant des mines.
Des cours de bourse et des suggestions d’investissements (Palerno
quant à lui recommande la haute technologie : puces, modems,
composants électroniques. Il en reparlera à la fin).
Les programmes de la télévision à courte échéance. |
Faut-il les dissoudre ? Certaines, seulement ? |
Et Palerno pense : ANTICIPATION. L’Internet est
une anticipation, l’avant-garde de la télévision qui multiplie les
chaînes et fait proliférer les bouquets. À chaque tribu sa
chaîne, et le téléspectateur sera bien gardé. Palerno sait que
des hommes de bonne volonté s’insurgent contre cette atomisation,
couvrent leurs dos de sacs et leurs têtes de cendres en pleurant le
lien social que garantissent, à leurs yeux, les chaînes
généralistes. Mais que faire de cette bonne volonté ? L ’Expert parfois quitte son écran des yeux, ou
sa souris, ou les voyants du modem, observe Palerno, guette ses
réactions, cherche dans ses yeux, sur ses mains : la palpitation d’une
narine, un indice de saturation. Mais Palerno n’est pas fatigué du
monde, et il peut l’observer sans lassitude, et longtemps : tout et n’importe
quoi. N’est-il pas payé déjà pour le faire ? Étudier la
télévision ? Palerno sourit. Et puis, soudain lassé d’attendre des signes qui ne venaient pas, l’Expert grommela : |
On en avait parlé à Palerno. Forums de
discussions, démocratie en marche, pouvoir échanger sur n’importe
quoi avec n’importe qui. Et poliment, en respectant la nétiquette.
Et puis il comprit très vite : l’Expert n’avait d’autre projet
que de l’écoeurer. Du coin de l’oeil, Palerno vit que l’Expert
jubilait. Pour l’achever sans doute, mais comme incidemment, l’écran
s’illumina de recommandations sur la nétiquette. La nétiquette.
Palerno résiste difficilement à un jeu de mot, et celui-là l’avait
séduit. |